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« Tu me parlais dans ta lettre de l’hédonisme comme d’un «privilège de l’Athée », «les pauvres croyants se privent de toutes les choses belles et bonnes du monde… ». Pauvre Hédonisme plutôt, celui dont le plaisir est arrêté par les objets seulement visibles, seulement audibles, seulement palpables… Pourquoi se priver d’un plaisir plus vaste, lié à l’ouverture possible de nos sens, pourquoi ne pas se réjouir aussi de l’invisible, du silence, de l’impalpable ? Quand on regarde la maison, pourquoi n’en voir que les murs et oublier l’espace, au-dedans et au-dehors, qui la rend habitable ? De nouveau je te cite le vieux sage : « Trente rayons convergent au moyeu, mais c’est l’espace médian, qui fait marcher le char. On façonne l’argile pour en faire des vases, mais c’est du vide interne, que dépend leur usage. » Une maison est percée de portes et de fenêtres, c’est l’Espace au-dedans qui rend possible l’habitat. Nous avons perdu cette Conscience de l’Espace, et c’est précisément cette Conscience que je retrouve ici dans la Méditation et la prière ; c’est cet Espace qu’il m’a été donné de vivre dans ma « chute » à Istanbul. – Jean-Yves LELOUP – « Lettres à un ami athée ».-